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Thomas Côte : "Paris-Saclay est un territoire pionnier sur la mobilité participative"

Thomas Côte est le cofondateur de Wever, une start-up spécialisée dans l’analyse de données et la conduite du changement des comportements de mobilité, basée à Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes).
Thomas Côte est co-fondateur de Wever, le "super-sondage de la mobilité".
© DR - Thomas Côte est co-fondateur de Wever, le "super-sondage de la mobilité".

Économie Publié le ,

Wever travaille depuis plus de quatre ans avec l’agglomération Paris-Saclay et ses acteurs locaux, notamment Nokia. Pour Thomas Côte, Paris-Saclay est un territoire pionnier en matière de mobilité participative.

La Semaine de l’Ile-de-France : Quel est le principe de votre activité ? Comment fonctionne votre plateforme ?

Thomas Côte : Nous faisons de la mobilité participative. Nous partons du principe qu'aujourd'hui, il y a une information que l'on ne collecte quasiment jamais, et que l'on n'utilise jamais dans le monde quand on crée du transport ou qu'on exploite du transport.
Cette information, c'est ce que vous-même connaissez de vos trajets. Pourquoi utilisez-vous tel ou tel mode, pour aller travailler, pour aller faire vos courses, et qu'est ce qui ferait que vous pourriez prendre un autre mode ? Qu’est-ce qui vous en empêche ? Cette information-là, à part dans quelques sondages ou enquêtes qui sont faits de manière extrêmement éparse, et tous les trois ou cinq ans, elle n'est jamais prise en compte.
Wever, c'est une plateforme qui va justement venir combler ce trou dans la raquette, en permettant aux personnes, comme vous et moi, d'aider leurs villes, leurs opérateurs de mobilité, leurs employeurs, leurs centres hospitaliers, leurs campus universitaires, en bref, tous les acteurs qui font de la mobilité, à améliorer les solutions de mobilité existantes et à en mettre en place de nouvelles, pour qu'elles soient plus efficaces et plus écoresponsables.

C’est une solution d’intelligence collective ?

Exactement. Nous parlons de “mobilité participative”, en référence aux concepts de la démocratie participative que tout le monde connaît. C'est une plateforme numérique qui vient rendre possible la mobilité participative.

Vous parlez de vos clients. Qui sont ces acteurs en Essonne ?

Du côté des opérateurs de mobilité, je pense à Transdev, à la RATP. S’agissant des collectivités, nous travaillons avec l’agglomération Paris-Saclay, et l’université du même nom. Quant aux employeurs du territoire, il y a notamment Nokia. Nous avons un beau plateau vitrine, si je puis dire, en Essonne.

© DR, Les cofondateurs de Wever, Thomas Côte (à gauche) et Brice Eichwald (à droite).

Comment fonctionne votre solution ?

En proposant aux usagers de faire remonter des données, cette solution va offrir à notre client un tableau de bord dynamique. Toutes ces données vont être traitées et valorisées pour être tout de suite compréhensibles. Nous apprenons, notamment, quels sont les freins au report modal, pour y apporter des solutions, qui sont de trois ordres.
Il est d’abord nécessaire de révéler, aux usagers, ce qui existe. Ils n’en ont pas forcément la connaissance, ou n’ont pas forcément compris l’impact du fait de choisir de prendre le bus plutôt que la voiture.
Ensuite, la deuxième chose que nous faisons avec les algorithmes et l'intelligence artificielle, c'est de suggérer comment améliorer l'existant. C’est-à-dire que les usagers sont au courant que cela existe, mais cela n’est pas utilisé parce que ce n’est pas adapté. Et là, l'algorithme va permettre d'automatiser toutes les recommandations (cela peut être l’horaire ou le lieu de l’arrêt pour le bus, la qualité de la station pour le vélo). C’est un champ assez large.
Enfin, le troisième point consiste à inventer et à mettre en place de nouvelles solutions. Cela peut être géolocaliser/positionner de potentiels lieux de coworking, créer des axes de transport en commun ou des pistes cyclables, dire à quel endroit il faut mettre des voitures partagées, des bornes, etc. Les clients acheteurs sont accompagnés dans la mise en place, tandis que les utilisateurs sont accompagnés pour s’approprier ces nouvelles manières de se déplacer.

Concrètement, comment cela s’est passé avec Nokia ?

Pour Nokia, l’objectif était de travailler sur des plans alternatifs au “tout voiture”.L’entreprise était en déménagement (à 80 %), du site de Nozay vers celui de Massy, avec une contrainte spécifique, la réduction par quatre des places de parking voiture.
Aussi, l’entreprise a prévu le nombre de personnes qui allaient passer au vélo. Le recueil des contributions l’a amené à doubler la surface de l’abri vélo. Celui qu'elle avait imaginé de prime abord était beaucoup trop petit. Nokia a ainsi évité un important problème de saturation du lieu de stationnement, mais aussi des inquiétudes sociales, des plaintes potentielles, des découragements à l’usage du vélo, etc.
Ensuite, la directrice du site, Sophie Bermond, m’a confié que l'accompagnement des usagers avait eu un impact très fort, en permettant de favoriser un report modal vers le transport en commun de manière très importante. Nous fournissons aux utilisateurs, suite à leur diagnostic, des informations sur le temps qu’ils gagnent, l’impact carbone et l’argent éventuellement économisé.

© DR, Plus de 5000 diagnostics ont été réalisés sur Paris-Saclay.

Troisième chose, Nokia a toujours eu des navettes d'entreprises très intéressantes pour venir compléter le réseau de transport en commun public. Nous avons complètement refondu les lignes avec les déclarations des participants. Il y a, actuellement, environ huit navettes qui tournent sur la base de la fréquence, de la capacité et des itinéraires et des horaires générés par l’IA sur la base des informations indiquées par les collaborateurs de Nokia sur la plateforme Wever.
Finalement, même si Nokia a mis en place un plan de mobilité dans une période de déménagement, tout s’est très bien passé. Alors qu’au départ, les diagnostics montraient que les taux d'inquiétude et de stress généré par le déménagement étaient importants. Et la pénibilité en matière d'accessibilité et de transport a diminué.

Le changement de comportement prend du temps. Maintenant, on est dans la mise en œuvre, parce qu’un plan de mobilité, par définition, selon la loi d'orientation de la mobilité, c'est diagnostiquer les besoins, mettre en place des actions et les suivre dans la durée. Il faut aussi, chaque année, mesurer l'impact carbone, vérifier qu'on est bien dans les objectifs et essayer de tendre vers le plus de neutralité possible.

Concernant, ensuite, les collectivités, vous disiez travailler avec l’agglomération Paris-Saclay, depuis quatre ans. Qu’en est-il ?

La Communauté d’agglomération Paris-Saclay fait appel à Wever depuis quatre ans pour identifier les pratiques et besoins au sein de son territoire, afin d'y rendre plus efficiente les politiques de mobilités. Près de 5000 diagnostics ont été réalisés. Ce dispositif a notamment permis d'objectiver les besoins de déplacement des salariés des ZAE de l’agglomération (1228 diagnostics, avec 38 % de taux moyen de participation, soit 22,5% des salariés concernés). Il a également permis de justifier la demande de développement d'offre de bus de Paris-Saclay auprès d'Ile de France Mobilités.
Il s'agit d'une vraie démarche de mobilité participative avec de nombreux acteurs économiques du territoire : les employeurs (Nokia), les campus (UPS), opérateurs fonciers (Société de la Tour Eiffel). Cette opération est nommée aujourd’hui maMob’.
Ensuite, pendant la crise sanitaire, l’agglomération, qui a déployé plus 12 schémas directeurs vélo, a pu, grâce à la plateforme, prioriser ses investissements en conséquence.

Le projet de l’agglomération était précurseur, finalement ?

Oui, clairement. Je remercie sincèrement Grégoire de Lasteyrie, son président, pour sa confiance. Paris-Saclay fait partie des vitrines et des pionniers sur notre approche. Nous avons toujours un temps d’avance, sur ce territoire, parce qu'on a beaucoup travaillé avec eux sur ce sujet.
Et oui, absolument, au lancement, je crois que Paris-Saclay est l’une des premières agglomérations avec qui l’on a travaillé. Nos équipes ont d’excellentes relations. maMob’ est devenue une petite institution. Quand on sait que l'université de Paris-Saclay et des acteurs comme Nokia se lancent dans la démarche, je crois que le message est très fort.

Vous parliez de l'université de Paris-Saclay, c'est encore un plan de mobilité ?

Oui. L’université vient de lancer la démarche il y a un peu moins d'un an maintenant.

Que va-t-il se passer ensuite ?

Nous allons commencer à analyser les données. Ce qui est très intéressant sur l'université, c'est qu'elle brasse énormément de monde. Donc, il va y avoir beaucoup d'échanges avec l’agglomération sur le fait de savoir comment les infrastructures publiques peuvent le mieux possible desservir à l'université, puisque là, on est sur un établissement public.
Deuxièmement, on va se demander comment l'université peut elle-même orienter ses choix d'investissement, dans des solutions qui seront réellement efficaces et opérationnelles pour les étudiants, mais aussi pour les personnels et les enseignants, puisque la démarche est globale sur l'université. Il y a les chercheurs, les enseignants, les personnels et les étudiants.

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