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Universités d'été de la profession comptable 2023

Philippe Vincent : « Une édition encore plus intense que les précédentes »

Président de la CRCC de Versailles et du Centre, Philippe Vincent présente l’événement phare de la profession à chaque rentrée, les Universités d’été, avec l'Ordre des experts-comptables de Paris Île-de-France et la CRCC de Paris.
Philippe Vincent prévoit une belle réussite pour l'édition 2023 des Universités d'été de la profession comptable.
© DR - Philippe Vincent prévoit une belle réussite pour l'édition 2023 des Universités d'été de la profession comptable.

Économie Publié le , Propos recueillis par Boris Stoykov

Il revient aussi en détails sur les missions actuelles et futures des commissaires aux comptes, ainsi que sur l’impact des nouvelles technologies et des normes grandissantes sur cette profession.

Affiches Parisiennes : Les Universités d’été sont un grand rendez-vous de formation. Qu'est-ce que cela représente pour la CRCC de Versailles du Centre ?

Philippe Vincent : C'est un événement important. Nos deux professions, que ce soit les experts-comptables ou les commissaires aux comptes, sont, aujourd'hui, au cœur de transformations majeures de l'économie. La première, c'est la durabilité, qui impose de nouvelles obligations pour les entreprises, qui vont attendre de nous en retour de l'accompagnement ou une assurance sur la crédibilité de leur information. Et la deuxième, c'est la facture électronique, que j'engloberai dans quelque chose de plus général, qui est la digitalisation de l'économie. Ces flux comptables vont nécessiter une rapide et profonde transformation de nos méthodes de travail, quelles que soient les professions. Dans ce contexte, ces Universités d'été sont une occasion unique de proposer à nos consœurs, à nos confrères et à leurs collaborateurs, j'insiste sur ce point, un panel le plus large possible de formations, de conférences, d’informations sur l’actualité et de rencontres avec des partenaires.

Tous les partenaires présents répondront de manière la plus individuelle possible aux besoins de nos consœurs et confrères, afin qu’ils trouvent chaussure à leur pied en fonction de leurs besoins. Je rappelle quand même que la profession francilienne, c'est environ 40 % de la profession nationale. Nous avons donc des confrères spécialisés dans différentes activités, organisées de façon structurellement différente.

Ces UE sont aussi un lieu de rencontre, de partage et de convivialité. Vu le succès des précédentes éditions, je ne prends pas trop de risque à dire que cette édition semble partie pour atteindre un nouveau record. Et à ce titre, je rappelle que la CRCC de Versailles et du Centre organise, le 5 septembre prochain, une soirée réservée aux jeunes de la profession, aux jeunes inscrits notamment.


Vos professions sont donc en train d'évoluer avec tous ces changements, notamment la facture électronique, l'intelligence artificielle ?

Ce sont des enjeux à très court terme pour nos professions. Parmi ces enjeux de digitalisation, le plus « immédiat » concerne les experts-comptables sur le volet de facturation électronique. Mais pour nous, commissaires aux comptes, c'est l'enjeu d'après-demain puisque l'accès et le traitement de la donnée sont de plus en plus simplifiés par les nouvelles technologies. Cela crée des attentes du côté des entreprises que nous auditons, afin que l'assurance que nous leur apportons soit renforcée. C'est probablement bientôt la fin de la méthode du test par sondage que nous avons tous connus dans nos métiers de commissaires aux comptes. Nous allons devoir nous adapter et, en tant que CRCC, apporter des éléments de formation à nos confrères pour leur permettre de franchir cette nouvelle marche.

Comment peut-on distinguer les deux métiers, aujourd’hui ? L'expert-comptable accompagne en amont et le commissaire aux comptes contrôle ensuite ?

Il y a une fausse ambiguïté qui tient à l'histoire de nos professions, mais je pense qu'aujourd'hui, les rôles de chacun sont extrêmement clairs et personne n’a intérêt à se battre sur la petite portion sur laquelle se retrouvent nos professions. L'expert-comptable est là pour accompagner le chef d'entreprise, notamment des plus petites d'entre elles, pour être son conseil, être celui qui va lui permettre de se structurer, de répondre à ses obligations. Il est le conseil privilégié de l'entreprise.

L'auditeur est là pour répondre à l’exigence sociale et économique de crédibilité des informations qui sont produites par des entreprises et ce, de manière totalement indépendante. C'est ce qui fait la force de cette distinction très claire, que nous sommes l'un des seuls pays au monde à avoir opérée, entre celui qui accompagne et met en œuvre et celui qui vient valider, en toute indépendance, que tout cela est fait dans les règles de l'art. C'est quelque chose qui se distingue aussi d'ailleurs à travers nos ministères de tutelle : les experts-comptables dépendent de Bercy, nous de la Chancellerie. Les auditeurs aujourd'hui sont des experts du droit et de l'économie. Nous ne sommes pas un métier du chiffre et je pense qu'il faut arrêter avec ce label ou cette affectation, de même que les experts-comptables ne sont pas que les experts de la comptabilité. Ce sont des experts-conseils pour moi. La distinction est très claire, d’autant plus que l'État français a poussé pour que les auditeurs légaux soient les premiers sur la liste de ceux qui pourront auditer, demain, les informations sur la durabilité.

Comment voyez-vous l’intelligence artificielle ? Sera-t-il facile pour vous de contrôler des éléments où l'intelligence artificielle est intervenue ?

L'intelligence artificielle, et d'une manière générale tous les systèmes d'information, c'est déjà quelque chose que nous avons embarqué dans nos compétences et qu’on ajuste au fur et à mesure. L'intelligence artificielle n'est qu'un outil supplémentaire pour permettre une automatisation de certaines tâches. Ce sont des outils nouveaux qu'il faut appréhender et c'est quelque chose que nous allons faire. Il ne faut pas en avoir peur. Je pense que l'intelligence artificielle, là où elle est un challenge pour nous, c'est dans nos propres méthodes de travail. Moi aussi, j'ai commencé à faire de l'audit avec du papier, un crayon et une gomme. Aujourd'hui, nous utilisons déjà des logiciels plus ou moins avancés suivant les cabinets. La technologie va surtout révolutionner nos méthodes de travail, mais après c'est une question d'implication, de formation. Il est clair que l'enjeu pour nous va être d'embarquer tous nos confrères, parce que là, en revanche, si on manque le train, ce sera difficile de courir après.


Sur la réglementation, avec davantage de normes, européennes et internationales, les audits sont-ils plus difficiles ?

Les normes, on aime ou on n'aime pas, mais il est vrai qu'il y a une tendance depuis une trentaine d'années à un empilement des obligations normatives applicables, notamment aux entreprises. Nous pourrions nous en réjouir du côté de notre profession parce que ce sont généralement aussi des éléments qui occasionnent des travaux supplémentaires. Je le rappelle toutefois, nous ne sommes pas ceux qui écrivons les normes, et nous ne poussons pas à leur adoption. À la CNCC, nous avons été les premiers à appeler à garder une certaine forme de raison sur l'étendue de ce qui serait demandé aux entreprises. Après, nous avons effectivement une évolution culturelle dans les environnements occidentaux qui tend à une normalisation de plus en plus accrue. Évidemment, cela fait partie des choses que l'on intègre dans nos travaux.

Vous exercez aussi un contrôle des risques en interne. Aujourd'hui, est-ce là la grande qualité de l'auditeur, la prévention des risques ?

Sur la prévention, d'une manière générale, nous avons une mission permanente. C'est d'ailleurs quelque chose que la CRCC de Versailles du Centre a souvent rappelé, via des actions de soutien, par exemple, du club Roseau ou du CIP 78. Nous organisons des conférences sur la prévention auprès des entreprises avec les Chambres de commerce, la Banque de France régionale, le tribunal de commerce de Versailles, pour rappeler que le commissaire aux comptes a un rôle à jouer dans cet élément de prévention. Nous sommes impliqués pour prévenir la non-conformité avec certaines obligations comptables puis avec certaines obligations légales. Nous avons un devoir d'alerte au-delà de la procédure, nous devons rappeler aux dirigeants, aux actionnaires les incidences que pourraient avoir le non-respect de certaines de leurs obligations. Ce rôle très particulier nous est permis par notre position d'auditeur auprès des entreprises.

La CRCC de Versailles et du Centre s'est montrée très active cette année encore, et continuera à l'être, pour rappeler à la fois à nos professionnels et à nos parties prenantes toute l'utilité du commissaire aux comptes dans ce contexte.

Lors des Universités d’été, un de vos ateliers, qui s’adresse aux jeunes, a pour thème « devenir auditeur légal ». Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

Auditeur légal est à comprendre comme auditeur dépositaire d'une délégation d'autorité, avec comme contrepartie une obligation d'atteindre un certain niveau d'éthique, de qualité et d’intégrité dans les travaux. Nous n’auditons pas la loi. Nous avons choisi ce thème pour rappeler aux jeunes aujourd'hui que ce parcours est un petit peu spécifique, parce que nous avons la conviction que le métier d'auditeur légal reste un métier d'avenir. D'abord parce qu'il va couvrir, et on le voit avec la durabilité, des champs qui vont aller au-delà de la comptabilité. Nous avons un savoir-faire qui fait que, dès lors qu'il y a de la donnée et des processus, nous savons apporter de l'assurance, du confort, de la confiance.

Au-delà du commissariat aux comptes, nous avons ce savoir-faire d'auditeur, assis sur des bases extrêmement solides, sur un code de déontologie extrêmement fort. Cela nous permet de répondre à un deuxième objectif pour les jeunes, avoir une mission qui fait du sens et qui peut apporter du sens dans tout un tas de domaines qui vont au-delà de la seule comptabilité. C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité avoir cet atelier, pour leur exposer comment devenir auditeur légal aujourd'hui, quelles sont les bases et les attendus et rappeler que nous faisons tout pour essayer de leur faciliter l'inscription puis l'installation.

Avec la durabilité, la RSE est quelque chose de primordial pour les entreprises. Quel est le rôle du commissaire aux comptes dans ce domaine ?

Pour les entreprises, il y a deux points fondamentaux. Le premier, c’est que les grandes entreprises vont être affectées directement et rapidement par des nouvelles obligations européennes de reporting. Notre rôle est de les rassurer le plus rapidement possible sur la qualité des données qu'elles vont émettre dans ce cadre, sur la conformité des données qu'elles vont élaborer avec l'attendu et, derrière de voir dans quelles mesures ces données peuvent s'articuler de manière intelligente avec les données comptables. Et puis, il y a toutes les autres entreprises qui ne sont pas soumises immédiatement à ces obligations, mais qui sentent bien que leurs parties prenantes ont des attentes particulières, ne serait-ce que pour obtenir des financements, répondre à des appels d'offres et qui ont besoin d'un accompagnement plus spécifique. Les auditeurs légaux ont un rôle extrêmement important d'éducation à jouer auprès de ces entreprises, pour leur exposer les risques et les avantages de rentrer dans ces exercices, d'apporter aussi un regard sur les méthodes à appliquer, comment s'y prendre pour élaborer une information, quelle information on donne, quelles sont les difficultés éventuelles. Nous avons ce rôle à jouer auprès de ces catégories d'entreprises.

Justement, sur l'importance de la formation des jeunes, vous avez co-créé avec les autres institutions de Paris Ile-de-France, Sup’Expertise. Quelle est votre vision à court terme et à moyen terme sur cette école et qu'est-ce que vous attendez d'elle ?

Nous sommes entrés dans cette initiative Sup’Expertise parce que cette école répondait à tout un tas d’objectifs, qui vont de la formation initiale à la gestion du stage, à la formation continue et à la VAE. C'était une proposition de valeur à un moment où l'attractivité de nos professions posait question. C'était une réponse sur le territoire francilien qui nous paraissait pertinente pour attirer dans nos cabinets des jeunes bien formés et talentueux. Un an après, l'objectif reste le même. Entre temps, par rapport aux dernières Universités d'été, certaines choses se sont passées, dont l'inauguration du nouveau campus à Courbevoie, campus qui est absolument superbe, où tout est fait pour faciliter la dispense d’un enseignement de grande qualité. Pour nous, cette école reste extrêmement pertinente au niveau du territoire francilien. Je rappelle que l’Île-de-France, c'est à peu près 40% de la profession, donc c'est aussi 40 % des besoins en recrutement. Avoir une école qui, sur une partie expertise-comptable, est totalement dédiée à cette formation et doit permettre, à terme, d'amener sur le marché entre 600 et 1 000 diplômés chaque année, ne peut qu’aller dans le bon sens.

Ce sera probablement insuffisant, raison pour laquelle la Compagnie nationale a également lancé une école de formation à l’audit, qui vise cette fois-ci plus spécifiquement les besoins des commissaires aux comptes. Il est clair que toutes ces initiatives doivent se combiner pour participer à répondre au manque de ressources auquel nos cabinets sont tous confrontés aujourd'hui.

Quel est votre sentiment sur ces Universités d'été qui approchent ?

Je suis impatient et enthousiaste à l'idée de retrouver nos confrères. Je pressens une édition encore plus intense que les précédentes, dont je garde une image extrêmement positive. Cela montre que nos professions ont confiance en leur avenir et que leurs institutions sont aussi en capacité de répondre à cette confiance, à la conforter. Et cela me réjouit.

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