AccueilSociétéÉric Dupond-Moretti promeut le travail en détention

Éric Dupond-Moretti promeut le travail en détention

En déplacement à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a promu le travail en détention face à une soixantaine de chefs d’entreprises.
Pour mieux convaincre les dirigeants, le ministre a notamment rappelé que le travail en prison avait fait l’objet d’une loi en décembre 2021, via la mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire.
© SIDF - Pour mieux convaincre les dirigeants, le ministre a notamment rappelé que le travail en prison avait fait l’objet d’une loi en décembre 2021, via la mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire.

Société Publié le ,

Sensibiliser le plus grand nombre sur l’importance du travail en détention et inciter les dirigeants à y recourir. Tels étaient les objectifs du ministre de la Justice lors de son déplacement à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, qui a marqué le lancement du Tour de France du travail pénitentiaire. « Si la prison vise à punir les délinquants et à protéger la société, elle doit aussi permettre la préparation de la réinsertion des détenus qui ont vocation à en sortir. Le travail, en tant que valeur importante de notre société, est un lien entre la détention et le monde extérieur », a souligné Éric Dupond-Moretti.

Face à un parterre d’une soixantaine d’entreprises, du PDG du CAC 40 au dirigeant de TPE-PME, le garde des Sceaux a d’emblée rappelé son objectif, à savoir atteindre au moins 50 % de détenus travailleurs, contre 31 % aujourd’hui. « Un détenu qui travaille en détention, c’est un détenu qui décuple ses chances de travailler en sortant de détention et qui a donc beaucoup, beaucoup moins de risques de récidiver. Je souhaite donc âprement développer la formation professionnelle et le travail en détention », a-t-il indiqué.

La mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire

Pour mieux convaincre les dirigeants, le ministre a notamment rappelé que le travail en prison avait fait l’objet d’une loi en décembre 2021, via la mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire. Cet outil permet aux détenus salariés de toucher jusqu'à 45 % du Smic, tandis que les cotisations sociales sont prises en charge par l'État. Les démarches administratives sont également réalisées par ce dernier. Mais cette loi a aussi donné une place centrale aux donneurs d’ordre, pour que la relation de travail se rapproche le plus possible de celle qui prévaut à l’extérieur de la prison.

« Au-delà d’une forme de flexibilité, grâce à une main d’œuvre d’appoint et une capacité à s’adapter à l’évolution de vos carnets de commande, le travail pénitentiaire est une opportunité, pour les entreprises, de se constituer des viviers de recrutement sur des métiers qui peuvent être en tension », a poursuivi le ministre de la Justice, qui a également inauguré les ateliers de Yoti, un acteur déjà engagé pour le travail en prison. Créée il y a deux ans, cette structure emploie des détenus du centre pénitentiaire de Bois-d'Arcy, pour reconditionner et commercialiser des jouets de seconde main. Depuis le mois d’octobre, son atelier de 700 m2, implanté dans la maison d’arrêt, accueille 30 opérateurs. Sa mission est aussi d’accompagner ces prisonniers dans leur projet professionnel, afin « d’éviter les sorties sèches », qui « contribuent à la récidive ».

Dans la même veine, le garde des Sceaux a échangé avec les équipes de Paris Façonnage, une entreprise qui réalise également dans ce centre pénitentiaire de la sous-traitance industrielle, notamment dans l’automobile et la cosmétique (assemblage de bouteilles de parfum).

© SIDF - Une soixantaine de dirigeants était présente à la maison d'arrêt.

Deux possibilités ouvertes aux dirigeants

Comme Éric Dupond-Moretti l’a également rappelé, les dirigeants ont deux possibilités pour faire appel au travail pénitentiaire. Ils peuvent, d’une part, passer des commandes aux ateliers de l’agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle (Atigip) ou auprès prestataires de gestion déléguée (sous-traitance). Ils peuvent, d’autre part, implanter une partie de leurs activités en détention, en encadrant eux-mêmes la production.

Afin de faciliter les démarches des entreprises, l’administration pénitentiaire a mis en place un réseau de référents régionaux. Un site internet est également dédié à cette activité (www.travail-prison.fr ). Les employeurs peuvent y trouver des informations sur les lieux d’activité, les capacités de production et les caractéristiques des ateliers.

« Collectivement nous pouvons nous fixer de remettre au moins un détenu sur deux au travail », a acquiescé Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, se réjouissant que ce « pilier essentiel de notre société » soit ainsi mis en valeur. « Le travail est actuellement remis en cause par certains messages. Je dirais, plus largement, qu’il faut remettre la France au travail. Vous pouvez compter sur le Medef », a-t-il affirmé.

Les entrepreneurs engagés témoignent

Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6, a ensuite témoigné de son expérience, avec le lancement, en 2010, de la Fondation M6, chargée d’œuvrer pour la réinsertion des personnes détenues. « Nous souhaitions changer le regard de la société sur le rôle de la prison, par le décloisonnement entre l’univers carcéral et la société civile. Nous voulions aussi contribuer à la lutte contre la récidive, en préparant la sortie de prison des détenus et leur réhabilitation socioprofessionnelle », a expliqué le dirigeant, ajoutant que l’entreprise avait elle-même embauché des prisonniers en fin de peine. « Il y a une mobilisation très complète des équipes pour aider à cette réinsertion. Il n’y a jamais eu de problème », a ajouté Nicolas de Tavernost, encourageant tous ceux qui hésiteraient à franchir le pas.

Benjamin Fremaux, a ensuite présenté Idex, une société spécialisée dans les infrastructures énergétiques, qui dispose d’une vingtaine d’ateliers au sein desquels 1200 détenus travaillent tous les jours. « Nous sommes limités par la demande, nous avons besoin de mieux vendre ces activités. Je vous incite à faire appel à nos prestataires. Au-delà de l’engagement, c’est une prestation de qualité coût-délais qui est réalisée », a-t-il lancé.

Le chef et président de l’Umih Thierry Marx a également pris la parole pour évoquer sa formation “Cuisine mode d’emploi(s)”, lancée en 2018 à la prison de Fleury-Mérogis. Les détenues y apprennent à maîtriser 80 gestes et 90 recettes. Elles peuvent ensuite décrocher un certification de formation professionnelle reconnu par l’État.

En somme, le ministre de la Justice considère que le travail en détention est à la fois gagnant pour le détenu, pour l’entreprise, et pour la société. Elle est aussi gagnante pour la victime, que le détenu peut mieux indemniser. Et Éric Dupond-Moretti de conclure : « J’ai le sentiment que collectivement nous n’avons pas perdu notre temps et que tout cela va aller dans le bon sens ».

La vétusté de la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy en question

La veille de la visite du ministre à la maison d’arrêt de Bois-d'Arcy, l'Observatoire international des prisons (OIP) et plusieurs barreaux franciliens ont saisi le tribunal administratif de Versailles d’un référé-liberté, en raison de la vétusté des locaux. Il faut savoir que le centre pénitentiaire compte 777 détenus, pour 503 places effectives, selon sa direction. En décembre, après avoir constaté des "conditions de détention indignes" dans cet établissement, le Contrôleur général des lieux de privations de liberté (CGLPL) avait recommandé d’y suspendre les incarcérations. Interrogé sur ce sujet, le garde des Sceaux a notamment affirmé que le budget alloué à la réhabilitation des cellules avait augmenté de manière conséquente. Comme il l’a rappelé, deux tranches de travaux sont prévues sur ce site. La première sera terminée à la fin du printemps et la deuxième est prévue pour 2024.

Partager :
Abonnez-vous
  • Abonnement intégral papier + numérique

  • Nos suppléments et numéros spéciaux

  • Accès illimité à nos services

S'abonner
Journal du 25 avril 2023

Journal du25 avril 2023

Journal du 18 avril 2023

Journal du18 avril 2023

Journal du 11 avril 2023

Journal du11 avril 2023

Journal du 04 avril 2023

Journal du04 avril 2023

S'abonner
Envoyer à un ami
Connexion
Mot de passe oublié ?