Dans un entretien accordé à l’AFP, le président directeur général du groupe Aéroports de ParisAugustin de Romanet est revenu sur l’été des aéroports parisiens. Il a évoqué les temps d’attente en baisse, les recettes en hausse ainsi que les prévisions de trafic confortées, et parlé de la grosse panne à Orly. Aussi, le PDG a avoué redouter que l’inflation finisse par faire fléchir la demande voyages aériens, tout en plaidant à nouveau pour une utilisation raisonnée de ce moyen de transport sur fond de crise climatique.
Quel bilan opérationnel le groupe ADP tire-t-il de la saison estivale ?
Augustin de Romanet : Le bilan est très positif à tous égards. Aux postes d'inspection filtrage (des bagages à main avant l'embarquement, NDLR), 95 % de nos passagers ont attendu moins de 10 minutes, grâce notamment à la mise en test de systèmes de scanners de nouvelle génération qui ne nécessitent plus d'isoler les liquides et les matériels informatiques. Aux frontières, 90 % des passagers ont attendu moins de 10 minutes à Orly, et 84 % à Charles-de-Gaulle. Cela a été permis par le recrutement de 270 contractuels par la police, ainsi que l'installation de 17 sas automatisés de plus, soit 139 au total.
Nous avons aussi mis l'accent sur l'accueil des passagers : 1 220 personnels ont été déployés à Charles-de-Gaulle contre 975 en 2022. A Orly, il y en avait également 20 % de plus, avec au total 520 personnes.
Nous sommes très confiants dans le fait d'être dans le haut de la fourchette de nos prévisions financières qui sont de retrouver cette année entre 87 et 93 % du trafic de 2019, même si à Charles-de-Gaulle, nous n'avons que 30 % du niveau de 2019 des passagers en provenance et à destination de Chine. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour nos recettes par passager, même si celles-ci sont en hausse et continuent à être satisfaisantes.
Un des terminaux d'Orly a été le théâtre début août d'une panne du tri de bagages à l'embarquement, provoquant un gros désordre pendant 12 heures. Quels enseignements en avez-vous tirés, un an avant les Jeux olympiques ?
Cet incident était lié à une panne inédite d'un routeur informatique. Nous avons eu du mal à joindre le patron de la société italienne Leonardo responsable de cet équipement. Il a reconnu que ses équipes, qui avaient détecté la panne à 3h du matin et n'ont pas été en mesure de la régler à 6h, auraient dû appeler le deuxième niveau (de responsabilité), ce qu'elles n'ont pas fait. Nous avons perdu six heures de la faute du prestataire, à qui j'ai remonté les bretelles et qui va venir me voir début septembre.
De notre côté, nous étions tellement désireux d'éviter de nuire aux passagers que nous n'avons peut-être pas vu tout de suite le profit que nous aurions pu tirer d'une réorganisation des avions dans les autres terminaux. Mais nos équipes sont revenues de vacances, des membres du comité exécutif sont venus ramasser les valises à la main, je pense que ça augure très bien de l'engagement des équipes d'ADP en vue des JO. Grâce à ces centaines de volontaires, nous avons pu éviter toute annulation et réexpédier l'intégralité des bagages en trois jours. C'est une mécanique de précision, et nous avons appris de cet épisode. Nous sommes désolés pour les passagers qui en ont été victimes.
Vous avez suscité l'étonnement en appelant à utiliser l'avion de façon plus raisonnée, face à la crise climatique. Plus largement, voyez-vous se profiler un essoufflement de la reprise post-Covid ?
S'il n'y a pas une modération dans l'utilisation du transport aérien dans la période où les carburants durables et les avions électriques ne seront pas totalement disponibles, nous ne pourrons pas éviter l'examen de mesures coercitives, de limitation autoritaire du nombre de vols en avion. Je pense préférable d'appeler solennellement à la responsabilité personnelle.
Concernant la demande, il est possible qu'on atteigne un niveau de prix qui entraîne des conséquences sur le niveau de trafic une fois passé le "revenge travel" post-Covid.
Même si cela ne voit pas dans les chiffres, j'ai le sentiment que les gens commencent à trouver que les hausses de tarifs commencent à mordre, d'autant plus que tous les autres postes de dépense des ménages explosent.